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Fables de La Fontaine
IV
LES OREILLES DU LIÈVRE.
Un animal cornu blessa de quelques coups
Le lion, qui, plein de courroux,
Pour ne plus tomber en la peine,
Bannit des lieux de son domaine
Toute bête portant des cornes à son front.
Chèvres, béliers, taureaux, aussitôt délogèrent;
Daims et cerfs de climat changèrent:
Chacun à s’en aller fut prompt.
Un lièvre, apercevant l’ombre de ses oreilles,
Craignit que quelque inquisiteur
N’allât interpréter à cornes leur longueur,
Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles.
Adieu, voisin grillon, dit-il; je pars d’ici:
Mes oreilles enfin seroient cornes aussi;
Et quand je les aurois plus courtes qu’une autruche
Je craindrois même encor. Le grillon repartit:
Cornes cela! vous me prenez pour cruche!
Ce sont oreilles que Dieu fit.
On les fera passer pour cornes,
Dit l’animal craintif, et cornes de licornes.
J’aurai beau protester; mon dire et mes raisons
Iront aux Petites-Maisons.
Le lion, qui, plein de courroux,
Pour ne plus tomber en la peine,
Bannit des lieux de son domaine
Toute bête portant des cornes à son front.
Chèvres, béliers, taureaux, aussitôt délogèrent;
Daims et cerfs de climat changèrent:
Chacun à s’en aller fut prompt.
Un lièvre, apercevant l’ombre de ses oreilles,
Craignit que quelque inquisiteur
N’allât interpréter à cornes leur longueur,
Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles.
Adieu, voisin grillon, dit-il; je pars d’ici:
Mes oreilles enfin seroient cornes aussi;
Et quand je les aurois plus courtes qu’une autruche
Je craindrois même encor. Le grillon repartit:
Cornes cela! vous me prenez pour cruche!
Ce sont oreilles que Dieu fit.
On les fera passer pour cornes,
Dit l’animal craintif, et cornes de licornes.
J’aurai beau protester; mon dire et mes raisons
Iront aux Petites-Maisons.